samedi 20 mars 2010

Near Dark (Kathryn Bigelow, 1987)


Il y a deux concepts auxquels je serai probablement hermétique toute ma vie : les vampires et le groupe Kiss. A chaque fois que je tombe sur une adaptation de Dracula ou un morceau de Destroyer, c'est comme si on me tendait un poème en sanskrit et qu'on me demandait de le faire réciter à l'envers par un écureuil : ce n'est pas tant que ça me débecte, juste que je ne saisis pas l'idée.

Si je n'ai jamais rien trouvé à sauver chez Kiss (et surtout pas le désolant Kiss Contre Les Fantômes de Gordon Hessler, tellement mauvais que je n'ai même pas réussi à en tirer un roman-photo valable), j'ai longtemps considéré Near Dark comme le seul film de vampires techniquement regardable. A vrai dire, j'adorais ce film. A tel point que j'ai toujours refusé de le revoir pour ne pas en altérer le brûlant souvenir. Sans doute parce que je savais que pour en garder une image aussi parfaite, j'avais fatalement du en occulter les plus évidents défauts.

Pourtant, durant ses 60 premières minutes, Near Dark est aussi génial que dans mon souvenir, si ce n'est bien meilleur encore : sombre, crade, poussiéreux, enveloppé dans une nuit où l'on s'enfonce jusqu'au vertige, et riche en mandales haut-de-gamme (la scène où Caleb tente de rentrer chez lui sous le soleil avant d'être happé par le camping-car, magistrale). Pas le moindre faux pas, pas la moindre erreur de dosage, pas le moindre faiblesse, et pour cause : absolument tous les travers du film sont concentrés à leur degré de pureté maximum sur les 35 minutes de fin.

De la grotesque "guérison" du héros (livrée avec son authentique moment de bonheur-retrouvé-avec-enfant-de-moins-de-10-ans-filmé-au-ralenti) à la subite mutation des vampires (personnages froids, rageurs et méthodiques, transformés en bouffons frénétiques au fur et à mesure qu'ils révèlent leur clownesque cruauté et/ou leur fatigant romantisme), le derniers tiers de Near Dark, loin de relever de la simple maladresse, contamine littéralement le film jusqu'à définitivement le griller dans un inénarrable final secoué par les foudroyants hoquets de la honte.

En 1987, date à laquelle Near Dark est sorti aux USA, le Viennois de Chambourcy était en France l'indiscutable blockbuster des desserts domestiques. Une de ses plus singulières particularités était de radicalement diviser la population entre, d'un côté, ceux qui mélangeaient la crème et le chocolat afin d'obtenir une onctueuse pulpe de merde, et, de l'autre, ceux qui auraient préféré être abattus comme des chiens plutôt que de se livrer à pareille hérésie. Je faisais clairement partie de cette dernière catégorie. Il faut croire que, malheureusement Kathryn Bigelow aussi.

2 commentaires:

  1. le truc, c'est qu'une fois mangée la mesquine couche de chantilly, on était un peu découragé à l'idée de tout ce chocolat noir légèrement gélatiné

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  2. aaah Near Dark; pas revu depuis un bail mais c'est le seul film de vampires new wave que je connaisse (non, pas les Prédateurs), la fin m'a pas laissé un souvenir aussi négatif même si je me souviens d'une espèce de nain ridicule qui crame en faisant de bruits bizarres; c'était grotesque mais poétique, comme si le soleil en sortant de sa cachette amenait avec lui tout les excès et le mauvais goût contenu, et le mauvais goût c'est un peu new wave aussi. sinon je fais partie de ceux qui touillent la chantilly avec le chocolat, et je trouve la fin de cette critique tout bonnement révoltante.

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